Tapisserie d’Aubusson tissée par l’atelier Pinton frères.
Avec son bolduc signé de l’artiste.
Circa 1960.
L’Œuvre de Lurçat est immense : c’est toutefois son rôle dans la rénovation de l’art de la tapisserie qui lui vaut d’être passé à la postérité. Dès 1917, il commence par des œuvres au canevas, puis, dans les années 20 et 30, il travaillera avec Marie Cuttoli. Sa première collaboration avec les Gobelins date de 1937, alors qu’il découvre simultanément la tenture de l’Apocalypse d’Angers qui l’incite définitivement à se consacrer à la tapisserie. Il abordera les questions techniques d’abord avec François Tabard, puis à l’occasion de son installation à Aubusson pendant la guerre, il définira son système : gros point, tons comptés, cartons dessinés numérotés.
Une production gigantesque commence alors (plus de 1000 cartons), amplifiée par la volonté d‘entraîner ses amis peintres, la création de l’A.P.C.T. (Association des Peintres-Cartonniers de tapisserie) et la collaboration avec la galerie La Demeure et Denise Majorel, puis par son rôle d’inlassable propagateur du médium à travers le Monde.
Son œuvre tissée témoigne d’un art d’imagier spécifiquement décoratif, dans une iconographie symbolique très personnelle, cosmogonique (soleil, planètes, zodiaque, 4 éléments…), végétale stylisée, animale (boucs, coqs, papillons, chimères…), se détachent sur un fond sans perspective (volontairement éloigné de la peinture), et destinée, dans ses cartons les plus ambitieux, à faire partager une vision à la fois poétique (il émaille d’ailleurs parfois ces tapisseries de citations) et philosophique (les grands thèmes sont abordés dès la guerre : la liberté, la résistance, la fraternité, la vérité… ) et dont le point culminant sera le « Chant du Monde » ( Musée Jean Lurçat, ancien hôpital Saint-Jean, Angers), inachevé à sa mort.
La salamandre, selon la tradition, peut traverser les flammes : chez Lurçat, c’est donc une allégorie du feu , dans “le chant du Monde” notamment (dans “l’eau et le feu”, la salamandre côtoie les poissons). Ici, elle irradie, cerclée de flammes, dans un entourage végétal cerné, et comme évidé. Par ailleurs la salamandre rejoint, dans son bestiaire personnel, d’autres lézards qui apparaissent régulièrement dans les tapisseries à compartiments/échiquiers/armoires (cf. par exemple “le jardin du rêveur”, 1947, Angers, Musée Jean Lurçat et de la Tapisserie Contemporaine).
Bibliographie :
Cat. Expo. Jean Lurçat, Tapisseries nouvelles, Maison de la pensée Française, 1956
Cat. Expo. Les domaines de Jean Lurçat, Angers, Musée Jean Lurçat et de la tapisserie contemporaine, 1986
Colloque Jean Lurçat et la renaissance de la tapisserie à Aubusson, Aubusson, Musée départemental de la Tapisserie, 1992
Cat. Expo. Jean Lurçat, Donation Simone Lurçat, Académie des Beaux-Arts, 2004
Jean Lurçat, le chant du Monde, Angers, 2007